mardi 21 février 2012

La Trahison des Éditeurs

Thierry Discepolo est un éditeur indépendant (Agone), marqué "à gauche" par ses convictions et sa ligne de conduite. C'est un homme droit dans ses bottes, radical. Le livre, pour lui, n'est pas un produit comme les autres ou ne devrait pas l'être. L’édition, de par sa nature, est forcément une tribune, un diffuseur d'idées, outil de débat mais également de propagande. Le constat est sociétal, politique : le livre n'est pas un média anodin.

Thierry Discepolo n'hésitera pas, dans une démonstration implacable et militante, à dénoncer le danger que représentent les superstructures commerciales pour l'indépendance éditoriale et donc pour la liberté d'expression. Il attaque, montre du doigt les connivences avec le pouvoir et réserve ses traits les plus durs aux éditeurs indépendants, ceux qui jouent dans la cour des grands : "Trahison" le mot est fort, proche de l'anathème. Mais n'a-t-il pas raison de pointer le double discours de ceux qui se servent d'un système tout en le critiquant ?

Car au delà de l'analyse précise, détaillée et nominative de l'édition française, au delà du combat où chaque assaut fait mouche, la question qui se pose est de savoir si des prises de position anticapitalistes sont tenables au sein même du système dénoncé.
Le système marchand dissout-il toute radicalité, toute pensée dans un effet "Kleenex" ? La grande distribution n'a-t-elle pas tendance à noyer les idées, les neutraliser dans un va-et-vient régulier et monotone ? La littérature n'est-elle pas aseptisée pour répondre à des impératifs de vente rapide et efficace ? Certains pensent que non : pour eux, la messe est dite. D'autres essayent de biaiser, jouer sur les deux tableaux : vendre leurs livres sans y laisser leur âme.
Pour Thierry Discepolo, la chose est impossible : l'histoire récente lui en fournit les preuves.

Pour lui, la petite édition peut vivre en dehors des gros groupes tout en restant intègre, intransigeante, en acceptant de travailler sur le temps long et non à brève rentabilité. Il faut rester fermes, auteurs comme éditeurs, savoir ce que l'on veut défendre car le danger du système capitaliste est une hyper-concentration des pouvoirs avec un contrôle de la pensée et une atonie des foules. Voilà la vraie menace.

La Trahison des Éditeurs, de Thierry Discepolo, aux éditions Agone (Contre-feux), 2011.

- Monsieur -

dimanche 12 février 2012

Vice

Vice, c'est d'abord un ton ; drôle, enlevé, détaché.
Une approche décomplexée du journalisme.
C'est une aventure où tout est "cool" , ce qui peut être énervant et sembler superficiel.
Mais Vice, c'est aussi des reportages "différents" autant dans leur spécificité que dans leur traitement.

Il pourrait, par certains aspects, rappeler le journal Actuel
car ses intervenants abordent les thèmes les plus divers sans aucun tabou, qu'ils soient légers ou douloureux (tatouages, drogues, mode, manifestation de l'Action Française, la vie en Corée du Nord, la vaginoplastie, les travestis en Indonésie...). Le terrain est souvent glissant mais l'approche est rafraîchissante tout en restant sérieuse.

Dans ce numéro de l'Enfant-Dragon, il est question d'exorcisme, de truands au Kenya, de la banque de sperme Cryos qui refuse les donneurs roux  mais aussi de la mode au Cambodge et du cinéaste Bruno Dumont...
Chaque sujet est présenté à la bonne franquette (malgré un vrai travail de préparation, d'écriture et de découpage) : on est en famille, entre potes. On navigue dans les marges avec décontraction.

Et on retrouve également des critiques de films, de disques et de livres, quelques pages dessinées et de nombreuses photos.

Mensuel et gratuit, il n'est malheureusement pas évident à trouver en dehors des grandes villes (pour la version française).
Mais ne pleurez pas, leur site Internet reprend tout ou partie de leurs reportages en texte, images et vidéos : une façon de vérifier que leurs collaborateurs et -trices n'ont pas froid aux yeux.

Vice, volume 6 numéro 2, février 2012. Illustration de couverture : David Choe.

- Monsieur -

mardi 7 février 2012

Le Plumier de la Nuit


Voilà longtemps que nous n'avions pas vu d'aussi beaux collages que ce soit dans leur composition ou dans leur force poétique ; composition harmonieuse d'où se dégage une atmosphère fantasmagorique, force poétique dans leur capacité à nous faire pénétrer au plus profond des rêves.

Mélanges d'illustrations et de gravures anciennes, leur puissance évocatrice imprime nos rétines de leur marque indélébile. Ce sont des aventures, des cauchemars, les tourments de la nuit... les angoisses vespérales propres à la vieille littérature, la chère littérature fin de siècle. Pierre Rojanski en est l'auteur, le magnifique démiurge !

De son côté, Hervé Delabarre a écrit des poèmes (dont la musicalité fait bouche) ajoutant du mystère à ces étranges paysages, le souffle tourmenté des mythologies anciennes.

Et l'éditeur, ainsi, réunit les "Deux Corps" dans une très belle union.

Le Plumier de la Nuit de Hervé Delabarre et de Pierre Rojanski aux éditions des Deux Corps, paru en octobre 2011.
250 exemplaires à l'impression soignée notamment dans la profondeur des noirs.

- Monsieur -

dimanche 5 février 2012

Pour la beauté du geste

Ce graffiti nocturne n'aura tenu que quelques heures après la levée du jour.


Non signé, éphémère, geste gratuit ou délire de potache, il se pose contre toutes les censures.

En soutien à celles et ceux qui refusent ou subissent les violences et les hypocrisies.
Une pensée particulière à Aliaa Magda ElmahdyA, blogueuse égyptienne et à Golshifteh Farahani dont le sein dévoilé n'a pas été du goût des autorités iraniennes.

- Monsieur -

En parallèle, un blog de dessins de nus, qui ne sera pas référencé sur google du fait de son contenu "inapproprié", c'est à dire jugé "adulte" même s'il n'est pas pornographique : Pour un dessin et quelques courbes.